Parlons plus, parlons mieux de la mort | Fondation la Traversée

Parlons plus, parlons mieux de la mort

Sujet bizarre! (pensez-vous sans doute) Je comprends cette remarque puisque lorsqu’on approche du mot mort, la plupart d’entre nous empressons de le balayer sous le tapis.

Qu’arrivera-t-il si vous prenez le temps de cohabiter avec le mot ne serait-ce que le temps de lire ce blog?

Il y a plusieurs années, je me rendais à un party de Noël du bureau. Je venais de garer ma voiture face à l’hôtel où se tenait la fête. À un moment « x », je traversais un grand boulevard, l’instant suivant, j’entendais des voix inconnues me demander quel était mon nom, où j’habitais, si je savais où j’étais, etc. J’avais été frappée par une voiture en traversant le boulevard sans jamais avoir vu la voiture ou avoir eu connaissance de l’impact. Heureusement, les blessures ont pu être guéries. Mais combien de fois dans les heures qui ont suivi l’accident j’ai entendu « Vous avez une bonne étoile, 10 cm de plus, 5 km/h plus rapide, impact à gauche plutôt qu’à droite, cela aurait été dramatique ». Pendant mon séjour à l’hôpital, j’ai pris conscience que je n’étais pas prête à mourir, trop jeune mais surtout j’ai fait le constat que je n’avais pas encore bien vécu ma vie. Cet incident a eu un impact majeur sur mon parcours par la suite.

Depuis mon implication dans le domaine de soins palliatifs, je me rappelle souvent cet évènement marquant et je constate que dans mes réflexions je n’avais jamais pensé à préparer ma mort. J’avais confirmé mon désir de donner mes organes le cas échéant et depuis j’ai fait un testament, j’ai aussi documenté ma volonté de ne pas recevoir de traitements médicaux extrêmes. Mais je me suis arrêtée là. Toute la documentation est toujours entre mes mains, communiquée à personne et gardée dans une enveloppe brune scellée à l’abri des indiscrétions. Pourquoi?

Simplement parce que ce sujet est malaisant, il nous apparaît négatif, alors soyons positifs et parlons plutôt de la vie. Les personnes qui sont confrontées à une maladie incurable ou celles qui sont en fin de vie ne le font pas parce qu’elles pensent qu’il faut protéger leur famille. Après tout, ne leur causent-elles pas déjà assez d’inquiétude, de dérangements et de tristesse? Les familles et les proches qui les entourent évitent d’aborder le sujet car elles craignent de détruire l’espoir du malade ou encore de le traiter comme mort avant qu’il meure.

Cela est une erreur. Nous avons avantage à le constater et à y remédier. Pourquoi?

Je nous invite à considérer les principes/réalités suivants :

  • Mourir fait partie de la vie.
  • En parler ne nous tuera pas.
  • La mort est un processus social plutôt que médical. Elle touche plusieurs domaines qui ont avantage à être adressés.
  • Aborder les sujets dérangeants associés à la mort peut permettre d’améliorer la qualité de vie jusqu’au décès.
  • Parler de sa mort nous permet également d’être responsable du déroulement de sa vie jusqu’au dernier moment plutôt que de subir des décisions non souhaitées.

Quelles sont les conséquences d’accepter de changer nos paradigmes et de considérer une nouvelle approche?

  • Un grand malaise – Je le concède mais est-il possible que les bénéfices dépassent largement un moment d’inconfort?
  • Mes parents âgés ou mon amie malade refuseront d’en parler – D’accord mais ils sauront que vous êtes prêt à les écouter lorsqu’ils souhaiteront aborder le sujet.
  • Ce n’est pas le bon moment – Cela est rarement le bon moment. Mais, ne connaissez-vous personne de votre entourage qui est décédé subitement ou victime d’un accident?
  • Et quoi d’autre…

Quels en sont les avantages d’en parler :

Pour le moment, je répondrai à cette question par une série de questions qui n’est pas exhaustive :

Est-ce que votre entourage connaît…

  • Vos désirs face aux traitements médicaux possibles si vous êtes victime d’un traumatisme qui vous rend incapable de les communiquer le cas échéant?
  • Où trouver les détails, accès, documents touchant vos affaires financières si vous ne pouviez le faire temporairement ou de façon permanente?
  • Qui vous souhaitez mandater pour prendre des décisions importantes pour vous ou vous concernant? N’est-il pas possible que vous ne souhaitiez pas confier ce rôle à votre conjoint ou à vos enfants? Ou encore, à quel fils? À quelle fille?
  • Où vous voulez mourir?
  • Si vous avez des peurs qui pourraient être allégées? Peur de la noirceur, du silence…
  • Si vous avez un désir, un souhait qui pourrait facilement être satisfait?

Est-ce que votre entourage sait…

  • Si vous préférez le silence à la musique?
    • Quelle musique?
  • Si vous voulez un grand entourage autour de vous ou si vous préférez de petits groupes?
  • Qui vous voulez autour de vous pendant vos derniers moments?
  • Que vous ne tolérez pas les couvertures lourdes? Que vous aimez toucher la flanalette?
  • Si vous voulez voir un prêtre ou un confident en fin de vie?

Les mêmes questions se posent à l’égard de votre entourage.

Ce sujet est trop conséquent pour être traité dans un seul message. Vous êtes donc invités à réfléchir à ces propos et à consulter les prochains blogs où nous adresserons comment s’y prendre pour entretenir et documenter les conversations sur le sujet de la mort.

Bonne réflexion…

– Nicole Bourgoin Harlas

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